Salon des entreprises 2018 à Paris : mettre de l’innovation dans son business model
Deux interventions, mardi 7 février, dans le cadre du 25e Salon des Entrepreneurs à Paris… à l’invitation de Saint-Nazaire Audacity. La première sur le thème de l’innovation et business model, aux côtés de Corine Genet (professeure à l’école de management de Grenoble), Jean-Baptiste Bernicot (IDEA), Kamel Fellache (Speach me) et Arnaud Giraudon (Compte Nickel). La seconde consacrée à la transformation numérique dans les secteurs traditionnels de l’économie en compagnie de Jean-Michel Lucas (Cylaos). Des échanges passionnants.
Dans son livre Transformation digitale : l’avènement des plateformes, paru en 2016, Gilles Babinet cite le scientifique Joël de Rosnay pour définir l’entreprise de demain… qui est déjà celle d’aujourd’hui, le train de la mutation digitale étant lancé à grande vitesse : c’est une « plateforme d’intelligence collective ». L’auteur précise cette définition : « C’est une interface d’échange de données et de mise en œuvre du potentiel d’expertises distribuées ; un facteur d’aplatissement et de fluidification des processus. » Il en appelle au philosophe Michel Serres pour poser le cadre des relations entre les acteurs intra-entreprise(s) dont les plus jeunes : « La compétence est la seule légitimité ». Le phénomène en cours aboutit à l’émergence d’un nouveau paradigme, une nouvelle forme d’entreprise… chamboulée à tous les étages : organisation, production, business model… jusqu’à l’émergence d’une nouvelle culture.
Les plus innovants réinventent le « qui »
L’innovation, comme socle d’un business model réinventé, joue en ce domaine un rôle central. Dans la foulée du Salon des entrepreneurs de Nantes, en novembre 2017, la conférence organisée sur ce thème par Saint-Nazaire Audacity a prolongé le débat au SDE 2018 à Paris devant une affluence fournie, preuve que le sujet suscite l’intérêt : l’entreprenariat a le vent en poupe en France. D’un point de vue théorique, Corine Genet, professeure à l’école de management de Grenoble a rappelé l’intérêt d’une matrice structurée pour poser sa réflexion.
Quatre axes : qui, quoi, comment, combien. « Les plus innovants réinventent le Qui, a-t-elle précisé. Il y a en effet peu de marge sur le Comment. » Confirmation de la part d’Arnaud Giraudon, Président du Compte Nickel (premier compte bancaire sans banque chez les buralistes) : « Nous touchons par exemple un marché qui était non adressé… celui des interdits bancaires. Avec une cohérence entre une cible populaire, au sens noble du terme, et un réseau de distribution. »
Innovation ne rime pas toujours avec technologie ou startup !
L’innovation est le plus souvent associée à la technologie. Un coup d’œil rapide sur les réseaux sociaux, Twitter ou Linkedin, permet d’apprécier la profusion d’articles publiés sur la blockchain, l’intelligence artificielle (IA), le machine learning, les objets connectés (IoT)… Mais l’innovation peut aussi être découplée, pour tout ou partie, de la technologie avec l’ambition de se concentrer sur l’usage en vue de toucher un segment du marché qui n’est pas occupé par un opérateur majeur car il le juge non rentable. Cette capacité à attaquer par le bas est l’essence de la disruption.
Dans tous les cas, il doit y avoir rencontre entre une proposition de valeur et un marché dans le respect de l’équation Problème +/- Solution = Bénéfice. Il convient de confronter dans les meilleurs délais son offre aux cibles, entre test and learn et lean startup. « Les retours des clients sont toujours à prendre en compte, a rappelé Jean-Baptiste Bernicot, en charge de l’innovation au sein du Groupe IDEA. Tester auprès des parties prenantes permet aussi de travailler sur le Combien pour légitimer le business model. »
Le questionnement permanent fait partie de la démarche. « Persister sans s’entêter… » a résumé Arnaud Giraudon ! Approche confirmée par Kamel Fellache, co-fondateur de Speach me, la plateforme de micro-learning qui vient de boucler une deuxième levée de fonds à hauteur de 10 millions d’euros. En six ans, la startup nantaise a réalisé au moins trois pivots jusqu’à son positionnement actuel. A l’inverse, ne pas jouer la carte du changement à tout-va. « Je passe mon temps à refuser des évolutions pour le Compte Nickel, complète Arnaud Giraudon. Il faut savoir ne rien bouger quand cela fonctionne. »
Les opportunités de l’impression 3D avec Cylaos
En fin d’après-midi, second temps d’échange dans le cadre d’un workshop de 30 minutes dédié à la transformation numérique comme opportunité pour l’économie traditionnelle. Un atelier en compagnie de Jean-Michel Lucas, dirigeant de Cylaos et lauréat 2017 des Audacity Awards. Sentiment d’un décalage entre nos quotidiens de TPE, en recherche permanente d’innovations pour des offres différenciantes… et un public désorienté par le progrès qui s’accélère. Il reste un large travail d’acculturation à accomplir.
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Pierre Minier / Ouest Médias